STEPHAN EICHER – NON CI BADAR, GUARDA E PASSA…

Artiste : Stephan Eicher
Album : Non Ci Badar, Guarda E Passa…
Label : Universal Music Division Barclay
Lien : https://www.youtube.com/watch?v=SqCshM4TBQQ
Style : Chanson Française

Premier disque en concert de Stephan Eicher, Non Ci Badar, Guarda E Passa… est une réussite à la fois atypique et qualitative, que l’on ne rencontre que trop rarement pour ne pas la mettre en avant.

L’artiste suisse est comme ses deux frères initié à la musique par un père violoniste de jazz amateur. Il fait ses armes au sein de divers groupes dont celui de l’un de ses frères, Grauzone, qui connaît un éphémère succès grâce à un simple vendu à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires. Les débuts de sa carrière se font sous l’égide d’instruments électroniques en lien avec la New Wave naissante, mais le jeune Stephan Eicher vit ensuite son insuccès relatif comme un affront, et met toute son énergie dans l’objectif de gagner en popularité. Il introduit alors plus d’instruments acoustiques dans sa musique, allant jusqu’à en utiliser des anciens, comme la vielle à roue ou le cymbalum. C’est à peu près lors de la même période qu’il rencontre l’écrivain Philippe Djian sur le plateau de Rapido, l’émission télévisée d’Antoine de Caunes. Une amitié naîtra entre les deux hommes, qui conduira le romancier à signer la plupart des textes des meilleures chansons en français du chanteur polyglotte.

L’année 1989 est un véritable tournant pour la musique de Stephan Eicher, l’album My Place se vend à plus de deux millions d’exemplaires. L’album suivant, Engelberg, dépasse toutes les attentes, en partie porté par le titre Déjeuner En Paix, qui paraît indélogeable de la tête du Top 50. Sorti en 1993, Carcassonne reste d’un niveau de qualité au moins équivalent, bien que d’un succès moins retentissant. Une telle réussite donne lieu à des tournées chargées, ce dont témoigne Non Ci Badar, Guarda E Passa… le premier enregistrement de concert de l’artiste. Cependant, le suisse ne fait pas comme tout le monde, loin s’en faut : son album comprend deux disques, le premier rendant compte de ce que devait être un concert de cette tournée avec une foule conquise et une emphase en mesure de la part des musiciens, qui reprennent les titres que le public attend. Le deuxième donne à entendre des versions inattendues de ces mêmes titres, captées dans des endroits impromptus, joués souvent sans public au pied levé, qui donnent une autre vision de l’artiste, chargée de la magie du moment.

Déjà dans le premier disque alternent les titres où, emporté par l’énergie des musiciens rock, on a envie de chanter en chœur, avec d’autres où se partagent plus de sensibilité et d’émotion, aidé en cela par les textes de Philippe Djian, mélanges de poésie et de sentiments presque adolescents. Dans le deuxième disque, on passe dans quelque chose d’à peu près inédit qui semble nous rapprocher de la vie des musiciens en tournée, avec cette impression de partager leurs moments de fantaisie, comme ceux de tension larvée. Cette sensation est encore renforcée par la vidéo, qui accompagne la sortie du disque mais n’est malheureusement pas disponible dans la version numérique de l’album.

Bien loin de se placer dans ce qu’attend un audiophile lors de l’écoute d’un disque, la production est dans une autre démarche puisqu’elle parvient, de façon atypique par une prise de son qui ne cherche ni clarté ni précision, à créer une proximité avec les musiciens, chose qui peut parfois manquer aux disques trop léchés, où tout est souvent trop à sa place. Non Ci Badar, Guarda E Passa… est au contraire un disque qui déborde d’amour et de vie.