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JMR Voce Grande

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Voici la toute dernière réalisation du studio JMR. Si l’esthétique peut rappeler de façon lointaine mais néanmoins vivace la fameuse Offrande, la filiation s’arrête ici. En effet, la Voce Grande est un modèle complètement inédit, conçu from scratch et donc sans aucune référence au passé. À dire vrai, elle emprunte davantage à Adara qu’à n’importe quel autre modèle de la gamme. C’est dire si ses ambitions sont grandes…

résistance électronique enceintes JMR Voce Grande Jean Marie Reynaud

La Voce Grande est une fausse petite enceinte. De loin, on pourrait s’y laisser prendre. Mais dès que l’on s’approche, on sent bien qu’elle est globalement imposante. Ne vous arrêtez donc pas à la topologie de type Monitor, car elle n’a été adoptée en l’occurrence que pour ses bienfaits en matière de dispersion spatiale, un domaine dans lequel elle excelle, comme l’écoute saura le démontrer…

Par ailleurs, l’enceinte est totalement solidaire de son pied spécifique, lequel contient tous les éléments du filtrage. C’est assez pratique car cela permet de placer les bornes de raccordement le plus près du sol afin d’éviter des longueurs de câble HP supplémentaires, et surtout un aspect esthétique disgracieux.

Cette enceinte passive deux voies intègre un dispositif limitant les phénomènes de transmission solidienne de l’énergie vibratoire grâce à l’utilisation de matériaux de densité différente (MDF-aluminium). Entre ces deux matériaux est inséré un polymère spécifique fixé à l’aide d’une colle polyuréthane ayant la particularité de conserver une certaine élasticité afin de mieux juguler encore les vibrations du coffret. Sur un plan purement esthétique, cela se traduit par l’adoption d’une feuille métallique pliée en forme de U qui constitue l’essentiel de la carcasse, c’est-à-dire le baffle et les flancs.

Le découplage mécanique complet du socle de l’enceinte permet l’utilisation de patins de téflon comme interfaces avec le sol.

La charge propriétaire est constituée de quatre cavités à amortissement progressif débouchant sur un évent laminaire frontal. Cette charge n’utilise aucun absorbant, seules certaines parois sont tapissées de compound viscoélastique ou de bitume. Cette charge offre un temps de propagation de groupe très homogène et rapide pour un grave très articulé, transparent et incroyablement véloce.

Le médium/tweeter AST adopte un diaphragme étonnamment important de 120 mm de longueur (deux fois plus long que celui habituellement utilisé sur les autres modèles de la gamme) permettant une fréquence de coupure basse en 12 dB/octave à 1,2 kHz. Ainsi, ce transducteur couvre seul toute la zone de sensibilité de l’oreille jusqu’à 30 kHz. Ce diaphragme est constitué d’un pelliculage d’aluminium avionique extrêmement léger sur un support plissé en silicone parcouru d’une grecque et entouré de deux barreaux de néodyme exerçant un très fort champ magnétique. Contrairement à un ruban classique qui pousse l’air devant lui, l’AST pince l’air entre ses plis. Il est ainsi beaucoup plus rapide et surtout bien moins fragile. Extrêmement performant, il possède des caractéristiques dynamiques hors normes et un taux de distorsion extrêmement faible. L’absence de résonance propre du matériau utilisé donne à ce tweeter (large bande) exceptionnel des qualités de transparence, de dégradé harmonique et de transitoire hors du commun.

JMR Voce Grande noires enceintes Jean Marie Reynaud avant et arrière


Le woofer de 180 mm arbore un cône constitué de sept couches de carbone et de peek (polyétheréthercétone). Sa surface est ensuite soumise à un traitement au plasma lui conférant un aspect rugueux. Il possède au centre de sa bobine de 38 mm sur support fibre de verre (léger et rigide) une ogive anti-tourbillonnaire tournée dans la masse en aluminium. Son speeder est aéré à profil progressif. Ce boomer dispose d’un saladier en aluminium, un double aimant ferrite à aimantation lente. Son déplacement linéaire est très important et fait preuve d’une très grande tenue en puissance, lui conférant un grave rapide, descendant très bas et toujours très articulé avec de franches sensations d’impact.
Le filtre passif deux voies 12 dB/octave est centré à 1,2 kHz. Il utilise des composants passifs de très grande qualité (condensateurs à armature argent et terminaison câble HP1132 argent/cuivre, self à air en feuillard de cuivre pur désoxygéné de grande largeur ; résistances bobinées spécifiques recouvertes d’un tube de cuivre faisant office de dissipateur thermique et de cage de Faraday mise en liaison avec la terre du système). Le filtre est assemblé à la main sur un support antivibratoire et disposé en dehors de tout champ électromagnétique. Les composants sont triés et appairés avec une tolérance de 1 %. Ils sont directement soudés les uns aux autres et la liaison interne est réalisée à l’aide du câble argent/cuivre HP1132 dont la section a été doublée.

L’installation

N’oublions donc pas que les Voce Grande son des enceintes d’une certaine taille, et qu’elles s’épanouiront dans de grands espaces. Ne les confinez pas dans une pièce trop petite, vous prendriez le risque de passer à côté de leurs performances. N’ayez pas peur de bien les éloigner des murs latéraux et de la cloison arrière. Elles apprécient d’être installées en champ libre. Par ailleurs, si vous en avez la possibilité, ne craignez pas de les éloigner l’une par rapport à l’autre, et de créer ainsi une distance respectable entre les deux enceintes. Elles ont en effet une excellente dispersion. En matière d’amplification, il vous faudra leur offrir qualité et quantité. Un très bel intégré ou des éléments séparés feront leur bonheur. Dernier conseil, le câble HP. Bien sûr vous pourrez utiliser le modèle 1132 du constructeur, mais les essais auxquelles nous nous sommes livrés nous ont montré que l’on pouvait encore aller plus loin avec un modèle supérieur. Nos constructeurs hexagonaux seront tout indiqués, que vous optiez pour de l’Ul-Tim, du Sonata, ou de l’Aura !

enceintes JMR Voce Grande Jean Marie Reynaud close-up woofer tweeter et connections

Le son

La transmission est toujours un exercice difficile. Elle l’est davantage dans le cadre d’une relation père-fils. Et elle se complique d’autant plus que la personnalité du père est affirmée. La position de Jean-Claude Reynaud n’était donc pas évidente dès le début. Nous ne reviendrons pas sur la manière dont il a subtilement fait évoluer la marque JMR à partir du moment où il en a pris la direction. D’emblée, les observateurs attentifs ont pu remarquer qu’il avait imprimé sa marque avec finesse mais détermination, prouvant qu’il poursuivait l’œuvre paternelle sans le singer, ni se dédire. Mais si ses réalisations depuis une bonne dizaine d’année ont été à juste titre couronnées de succès, c’est véritablement avec cette nouvelle Voce Grande que JCR s’affirme comme un concepteur totalement émancipé et libéré d’une « mission » qu’il a remplie depuis longtemps. Tout dans cette enceinte respire la liberté. Il faut l’écouter au sein d’un bon système pour comprendre à quel point elle présente la musique enregistrée avec une absence totale de contrainte. Tout coule, tout est simple, évident, facile. Les disques s’enchaînent et l’on ne cherche absolument pas à analyser ce que l’on entend, mais juste à en jouir. Voilà la qualité absolument cardinale de la Voce Grande. Les observateurs érudits de la marque se sont forcément posé la question d’une filiation entre les Offrande du père et les Voce Grande du fils. Ce dernier a d’ailleurs attendu bien longtemps avant de s’attaquer au « mythe ». Permettez-moi de vous dire que ces deux enceintes n’ont strictement rien à voir, hormis le fait qu’elles sont toutes les deux très musicales et sont à classer dans la catégorie des « gros monitors sur pieds ». Néanmoins il faut être totalement objectif : la nouvelle éclipse l’ancienne sur tous les points.

La taille du spectre sonore reproduit est large. Elle procure un registre médium/aigu d’une homogénéité merveilleuse. On ne sent absolument aucune rupture entre l’aigu et le médium : l’un est le prolongement de l’autre et vice versa. La douceur de cette partie du spectre est assez rare. D’autant qu’ici, douceur ne rime aucunement avec rondeur ou avec langueur. Pour faire usage d’une analogie à la mode en ce moment, avec les Voce Grande, on allie les qualités d’une écoute à la fois minérale et organique. On bénéficie de la persistance aromatique d’un terroir minéral et de la densité du jus. D’où cette sensation de plénitude. Le grave est tout aussi réussi, ainsi que la transition grave/médium, bien que techniquement moins facile puisque JCR a choisi d’associer deux technologies assez différentes qu’il affectionne particulièrement. C’est un grave qui descend étonnamment bas pour une enceinte de ce gabarit, mais comme d’habitude chez le Charentais, toujours avec beaucoup de tension, d’expressivité, et sans la moindre impression flatteuse et/ou enrobée, preuve que la charge est impeccablement maîtrisée.

Et puis il y a l’image. Ah l’image… Combien de chroniqueurs spécialisés se sont cassé les dents sur ce concept obscur. Car il faut bien avouer qu’avant d’avoir fait l’expérience d’un système capable de reproduire une véritable image 3D (ce qui n’est pas une expérience fréquente), il est difficile d’imaginer ce que cela peut donner. Cette performance n’est pas uniquement l’apanage des systèmes hors de prix, mais elle exige impérativement une mise en œuvre soignée de l’installation. Ici, en l’espèce, le système a été très bien optimisé par Guillaume de CTA, grâce lui en soit rendue. Et c’est dans ces circonstances que nous avons pu profiter de l’une des plus belles retranscriptions holographiques toutes catégories de prix confondues depuis le début de notre carrière. C’est bien simple, les enceintes disparaissent totalement en tant qu’objets émissifs. On a beau se lever, évoluer dans la pièce, la scène reste étonnamment stable et surtout très bien étagée en profondeur. Toutes proportions gardées, la reproduction spatiale des Voce Grande est plus proche de panneaux que d’enceintes électrodynamiques. C’est suffisamment rare pour être mentionné.

JMR Voce Grande blanches Jean Marie Reynaud

Notre conclusion

Alors so what, comme dirait Miles ! Et bien bravo, tout simplement. Avec les Voce Grande, JCR a fendu l’armure. En ce qui nous concerne, il pourrait tout simplement arrêter là, car cette enceinte est une réussite. Pas racoleuse ni démonstrative, pas le moins du monde colorée, mais dotée d’un tempérament vivant et partageant les vertus du caméléon, elle sait reproduire tous les messages à n’importe quel niveau sonore, dans un vaste éventail d’acoustiques différentes et avec toujours cette légèreté, finesse et énergie particulièrement communicatives. Sur un certain nombre de paramètres, Voce Grande est pour nous supérieure à Adara. Ce propos choquera peut-être, mais bon c’est comme ça.

FICHE TECHNIQUE : JMR Voce Grande (enceintes compactes hifi)

  • Origine : France
  • Prix : 7 800 €
  • Dimensions (sur pied) : 1100 x 280 x 390 mm
  • Poids : 32 kg
  • Puissance nominale : 8 ohms (minimum 6,8 ohms)
  • Rendement : 88,5 dB/W/m 2,83 V
  • Filtre passif du deuxième ordre : 12 dB/octave centré à 1 200 Hz
  • Distorsion : Inférieure à 2 % de 200Hz à 18 kHz à 85 dB
  • Bande passante : 38 Hz à 30 kHz (35 Hz à -6 dB)
  • Puissance d’utilisation : 40 à 180 W
  • Raccordement : Mono câblage + 3e borne pour mise à la terre du filtre passif

Paru dans VUMETRE n° 31

VUMÈTRE N°31

7,00 10,00  TTC

Septembre – octobre 2020 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 €

UGS : VUMETRE31
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