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ENGSTROM Arne

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Retrouver la douceur et la sérénité d’écoute des meilleurs amplificateurs à tubes, voilà la mission que s’est fixée Engström. Pour cela, la petite entreprise familiale suédoise créée en 2008 s’est inspirée des meubles radio et des électroniques qui les composaient au cours des années 1960 ou 1970. Une spécificité qui offre à cet amplificateur à tubes un design assez surprenant et spectaculaire, qui le démarque d’emblée de la concurrence – à l’image de son comportement. Par ailleurs, ce dernier-né comblera les inconditionnels du célèbre tube 300B et de la musicalité exceptionnelle qui a fait sa réputation.

Pour préserver les moindres détails du signal sonore et lui permettre de s’exprimer pleinement, Engström a choisi d’offrir au Arne une architecture symétrique associée à une chaîne d’amplification sans contre-réaction. En effet, si la configuration des étages de puissance signe le tempérament final d’un amplificateur, le traitement du signal en amont, et donc les sections de préamplification, jouent un rôle fondamental et impactent considérablement son comportement. Il en est de même pour les étages drivers qui ont pour mission de piloter les push-pulls de tubes de sortie. Autre élément capital : l’alimentation. Sa mission ne se limite pas à la fourniture d’énergie aux différentes sections en toutes circonstances, et notamment lors des appels de courant liés aux envolées de dynamique les plus marquées. Les tensions délivrées aux différents étages doivent être stables, propres et ne pas interagir.

Pour réaliser l’étage d’entrée du Arne, Engström a fait appel à deux pentodes D3a de Siemens, connectées en triodes sur chaque canal. Elles sont alimentées en symétrique à partir de tensions négatives et positives. Le signal est appliqué par l’intermédiaire d’un transformateur d’entrée qui le symétrise, qu’il soit issu tant d’une entrée symétrique sur prise XLR que d’une entrée asymétrique sur prise RCA. Le signal traverse ensuite un atténuateur à 48 pas, d’origine Khozmo à résistances qui fait office de réglage de volume. Il attaque enfin les étages drivers des 300B. Cette section a été entièrement revue. Intégralement repensée, elle présente un taux de distorsion encore mieux maîtrisé et assure un pilotage plus efficace des 300B. Des transformateurs de sortie, basés sur une architecture à noyau en « C » réalisée en silicium/fer, assurent l’adaptation d’impédance finale indispensable pour piloter des enceintes conventionnelles 4 ou 8 ohms. L’ensemble de ces sections d’amplification travaille de manière parfaitement linéaire, ce qui permet de se dispenser totalement de tout dispositif de contre-réaction.

Comme nous l’avons dit, afin que ces étages à base de 300B puissent s’exprimer pleinement, Engström a particulièrement soigné l’alimentation de son amplificateur. Pour cela, elle se divise en deux sections, chacune basée sur un énorme transformateur torique. Le premier a pour mission d’alimenter la section préamplificatrice et l’étage driver, le second les push-pulls de 300B. Outre des condensateurs de forte valeur, le filtrage de ces alimentations met à contribution des selfs Lundahl afin de lisser parfaitement les tensions appliquées tant aux étages d’amplification et drivers qu’au push-pull de puissance. À noter qu’afin de délivrer 20 W sous 8 ohms et 30 W sous 4 ohms, les 300B sont alimentées en 400 V en tension de plaque. De même, pour une pureté absolue de la restitution, leur filament est alimenté en continu. Ces tubes se trouvent donc poussés dans leurs derniers retranchements. Ces valeurs seront donc à prendre en compte en cas de changement des 300B pour évaluer l’impact que chaque marque peut avoir sur la restitution finale.

En ce qui concerne la connectique, l’Arne reste assez conventionnel. Du côté entrées, on retrouve deux paires de prises XLR et RCA afin de se connecter sans problème aux sources analogiques, tant en mode symétrique qu’asymétrique. Il en est de même pour ses sorties. Deux paires de bornes WBT, capables d’accepter tant les fiches bananes que les fourchettes ou même directement des câbles de forte section, sont présentes. L’intégralité de cette connectique est de très belle qualité.

Enfin, l’Engström Arne se pare de finitions qui peuvent surprendre. Son coffret, de dimensions assez imposantes, adopte une forme asymétrique. Si l’essentiel de son châssis reste assez conventionnel, la partie supérieure de ce coffret est constituée d’une section en verre venant protéger les quatre 300B ainsi que les quatre triodes d’entrée tout en laissant l’utilisateur les admirer. Succession de courbes et de zones linéaires, cet habillage inhabituel confirme la volonté de l’Arne d’affirmer sa personnalité et de rompre définitivement avec les traditions. De plus, en raison de la production artisanale de ses produits, Engström propose une vaste palette de finitions et offre même la possibilité de les personnaliser.

L’installation

Sur le plan de l’encombrement, cet amplificateur cumule tous les superlatifs. Il est large, profond, haut, il est lourd et il chauffe. Bref, il faut le mettre en haut d’un meuble, ou mieux, sur une étagère indépendante où il sera seul. Le support doit être impérativement stable et rigide, car nous avons affaire à une électronique à tubes. Qui dit tube, dit effet microphonique. Le support doit donc être capable de filtrer le plus possible les vibrations pour que l’appareil fonctionne dans les meilleures conditions. Concernant les câbles, nous n’avons pas senti de contre-indication particulière. La seule chose sur laquelle nous nous devons d’insister, c’est la qualité du cordon secteur. Et surtout, celle des sources associées. Il est vital d’offrir à cet ampli les meilleures sources possibles, en analogique comme en numérique. Enfin, en matière d’enceinte acoustique, merci de vous référer au dernier paragraphe de la partie écoute.

Le son

Si l’on s’en tient strictement à la lecture de sa fiche technique, cet amplificateur est beaucoup trop cher. En revanche, si l’on prend le temps de l’installer dans les règles de l’art et de l’écouter dans un environnement qui lui convient au mieux, il est impossible de ne pas tomber profondément sous son charme. Pourquoi ? Je ne peux que tenter de vous donner des éléments de réponse. Car son pouvoir de séduction est au-delà des mots. Et en toute sincérité, dans une société dans laquelle tout est prévu, tout est pensé, tout est calculé, cela fait un bien fou… La toute première sensation qui vient spontanément à l’esprit est celle de présence, et plus particulièrement de la sensation que les musiciens sont là ! Pendant la période de chauffe et de réglage du système, je sors souvent de l’auditorium en laissant le son à un niveau réaliste. Et je vaque à d’autres occupations. Vous avez déjà dû certainement faire ce test d’écouter un système en étant dans la pièce à côté. C’est très intéressant, surtout lorsque l’on utilise des messages acoustiques peu ou pas traités. En l’espèce, j’avais fait tourner en boucle l’album Marseille de Ahmad Jamal. Et à un moment, j’avais véritablement l’impression que des musiciens s’étaient installés dans la pièce. C’était troublant. Voilà en quels termes je souhaitais faire référence à la présence, au sens de being there comme disent les Anglo-Saxons. Non seulement le Arne nous offre une vision inédite de la densité des timbres, mais, de surcroît, il couple cette valeur avec une impression de liant tout à fait inaccoutumée. La musique enregistrée s’écoule de façon ininterrompue avec un enchaînement de notes admirablement orchestré, mais également des transitions impeccables. En yoga, on dit que l’enchaînement des positions est tout aussi important que la qualité des postures elles-mêmes. La famille Engström doit donc souvent se livrer à cette discipline pour être parvenue à développer une machine qui rend la musique enregistrée aussi vraisemblablement humaine. Écouter ses disques avec cet amplificateur permet donc de toucher du doigt, et bien sûr des deux oreilles, la beauté sonore dans sa plus pure acceptation. Mais comment la beauté sonore se manifeste-t-elle pour nous embarquer dans sa magie ? Ici, c’est par la variété et le naturel. La beauté pour la beauté est une notion assez stérile. Engström l’a parfaitement compris. D’ailleurs, ce sont les messages les plus simples et les plus purs qui se livrent à nous avec le plus de réticence, de difficulté. Impossible de tricher avec un morceau purement acoustique, une voix humaine, un piano seul. La façon avec laquelle se matérialisent les voix au travers de l’amplificateur Arne a quelque chose de très spécial. Encore une fois, cette histoire de liant. Cela n’est pas sans rappeler la persistance aromatique que l’on peut éprouver à la dégustation d’un vin. Avec le Arne, les notes s’étirent, se prolongent, se dégustent. Le temps semble presque suspendu, parce que notre manière d’appréhender la musique est complètement différente. On ne porte plus notre attention sur des critères classiques, car la machine nous pousse à reconsidérer notre manière d’écouter.

Avant de conclure, il me semble important de vous entretenir brièvement sur le mariage entre le Arne et différentes enceintes. Nous avons réalisé l’essentiel de nos tests avec deux paires d’enceintes, les T&T Nel Extrême et les ZU Soul VUreplica. Dans les deux cas, le mariage a été extrêmement satisfaisant et nous a permis d’aborder deux univers bien distincts. Et si, sur le papier, les T&T sont supérieures aux ZU, c’est pourtant avec ces dernières, que le couplage a été le plus complémentaire. Cela tient certainement à l’absence de filtrage, au rendement de 100 dB, et à ce grand haut-parleur large bande en papier. Nous avons également eu l’occasion d’écouter cet ampli avec les excellentes Living Voice, une association que nous avons pleinement validée. Mais l’une de nos connaissances a obtenu un remarquable mariage avec des enceintes Wilson. Vous comprendrez que malgré les apparences, cet amplificateur est particulièrement universel. La réussite du mariage sera conditionnée par vos goûts et, bien sûr, par une optimisation poussée.

Notre conclusion

Il est rare de faire des rencontres aussi inoubliables. Nous avons passé de nombreuses heures d’immense bonheur musical en compagnie de cet amplificateur. C’est le genre de machine qui vous sort complètement de votre quotidien, qui vous fait oublier le temps pour vous capter dans le présent et vous mettre en étroite relation, en intimité devrais-je dire, avec vos précieux enregistrements. En toute sincérité, il n’y a pas grand-chose d’autre à ajouter. Nous espérons sincèrement que vous aurez l’opportunité d’écouter cette machine pour vous rendre compte à quel point ses géniteurs ont su déployer d’énergie et de savants stratagèmes pour parvenir à un résultat aussi admirable.

FICHE TECHNIQUE : ENGSTROM Arne

  • Origine : Suède
  • Prix : 33 000 €
  • Dimensions : 80 x 320 x 450 mm
  • Poids : 38 kg
  • Puissance de sortie : 30 W
  • Distorsion harmonique  : 1 % à 30 W
  • Réponse en fréquence : 10 Hz à 40 kHz +/- 1 dB
  • Gain : 20 dB
  • Sensibilité : 1 V pour 30 W en sortie @ 5 Ω de charge
  • Bruit : 90 dB sous la pleine tension de sortie
  • THD (sous 70 kHz) : 100 Hz – 10 kHz – 20 W moins de 0,5 %.
  • Impédance d’entrée : 12 kΩ
  • Impédance de sortie : 5 Ω

Paru dans VUMETRE n° 46

VUMETRE N°46

7,00 10,00  TTC

Mars – avril 2023 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 € Outre le plaisir de découvrir les nouveautés liées à votre passion et l’activité de l’industrie audio, nous vous proposons deux formats :

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