Cela fait 36 ans que la manufacture française Davis Acoustics développe et fabrique des haut-parleurs. En 1990, Davis présente Kristel, le kit qui a véritablement lancé la marque. En 2002, c’est avec César, première enceinte équipée d’un woofer de 31 cm, que le constructeur troyen se démarque totalement de la concurrence. Après de nouveaux autres jalons, Davis propose en 2022 la Stellar, son nouveau vaisseau amiral, conçu « from scratch » à partir de la philosophie et de l’expertise maison avec des haut-parleurs 100 % made in Troyes !
Je ne prendrais pas beaucoup de risque à déclarer que la Stellar est l’enceinte la plus aboutie jamais développée par Olivier Visan, le boss de Davis Acoustics. Elle embarque des avancées technologiques uniques, mais surtout elle se distingue par une ligne tout à fait spéciale. Artistiquement penchée vers l’arrière, elle est pourtant absolument stable. Solidement plaquée au sol par un socle en fonte d’aluminium pesant à lui seul 20 kg, la Stellar semble flotter dans l’air. Cette colonne est équipée de cônes de découplage usinés réglables en hauteur.
Elle arrive à votre domicile protégée dans son flight case sur roulettes. Sa livrée originelle est le noir laqué, mais vous pourrez choisir la finition que vous souhaitez moyennant un supplément de 5 000 € et trois semaines de délai en plus. Cela dit, je suis sûr que cela vous permettra de customiser votre enceinte à l’infini. Davis propose un riche nuancier de teintes et de textures : granité, pailleté, acidulé, métallisé, tout est possible !
En face arrière, deux substantielles bornes vissantes WBT NextGen permettent le raccordement à votre amplificateur. Juste au-dessus, on visualise les vents de décompression de la charge bass-reflex du registre grave. Mais c’est à l’avant que le spectacle est total.
La Stellar est une enceinte à trois voies équipée de trois haut-parleurs particulièrement aboutis et totalement propriétaires. Poursuivant sur sa lancée technique, Davis a opté pour la dernière génération de son tweeter à cône.
Dans les années 1970, Michel Visan, créateur de Davis et alors directeur technique chez Siare, conçut le TWZ. Ce tweeter utilisait non pas un dôme traditionnel, mais un cône en pulpe de cellulose, puis en fibres d’aramide – un matériau tissé, comme les membranes des autres haut-parleurs « maison ».
Très vite, chez Davis, le TW26K fut créé. Il fut ensuite décliné dans une version double ferrite que l’on trouve notamment sur les Kristel, puis dans un modèle en pulpe de cellulose TW26G. En 2009, le nouveau TW20K2FR fut lancé sur la Karla. Un modèle avec une bobine de plus petit diamètre, capable de monter plus haut en fréquence.
Le tweeter de la Stellar est la dernière version d’un transducteur aujourd’hui réputé. Pour augmenter sa transparence, un travail important a été réalisé sur le collage entre la membrane et la bobine mobile. Résultat : une linéarité quasi parfaite entre 2 500 et 25 000 Hz.
En outre, comme la géométrie de ce tweeter ressemble à celle du médium, la fusion des registres médium et aigu s’en trouve facilitée.
Les fréquences médium sont confiées à un haut-parleur à cône Kevlar™ de 17 cm de diamètre avec un châssis en aluminium décompressé. Il s’agit d’une version améliorée de l’excellent 16 GKLV6M. Il possède cette fois un aimant TiCoNAl surpuissant, qui génère une accélération ultra rapide de la membrane, permettant ainsi un son transparent. La bobine mobile est montée sur un support kapton.
Pour le grave, Olivier Visan a opté pour un 25 cm, un haut-parleur idéal pour ce type de registre. Sa membrane est suffisamment grande pour déplacer beaucoup d’air, mais elle reste toutefois assez légère pour supporter de fortes accélérations. Pour cela, la membrane est en fibre de carbone. C’est Michel Visan qui a travaillé ce matériau pour la première fois afin d’obtenir un cône hyper rigide.
Pour ce modèle sur mesure, Davis a fait réaliser des plaques de champ de 10 mm d’épaisseur, usinées au centième de mm. Le bobinage est long, il assure ainsi un contrôle parfait du déplacement de la partie mobile, même lors de longues excursions. Les éléments de centrage et de rappel (suspensions petits plis et spider) connaissent des constantes de raideur idéales pour descendre bas en fréquence, mais également pour contenir ses déplacements.
Pour harmoniser le fonctionnement de ces excellents transducteurs, il fallait bien évidemment un filtre à la hauteur. Et si le fait de concevoir et réaliser soi-même ses propres haut-parleurs permet naturellement de simplifier la tâche, il n’en reste pas moins que le filtre répartiteur d’une enceinte trois voies reste une gageure en termes de développement.
D’ailleurs, lors de notre visite à l’usine, nous avons pu photographier une table recouverte de prototypes des différentes étapes du développement du filtrage des Stellar. C’est impressionnant ! Plusieurs dizaines de filtres ont été fabriqués à partir de composants parmi les plus transparents du marché. De nombreuses séances d’écoutes approfondies s’en sont ensuivies et ont abouti à un filtre adapté. Le médium travaille sur une large plage de fréquences (150 à 2 800 Hz). Chacun des haut-parleurs est ainsi utilisé dans sa plage de fréquences initiale. Il n’intervient pas ou très peu sur les autres transducteurs, car Olivier Visan a utilisé un filtrage à pentes raides pouvant atteindre jusqu’à 24 dB/octave. Cela permet d’obtenir des zones de recoupement réduites entre chaque haut-parleur. Les niveaux sont étudiés pour obtenir une courbe linéaire de réponse en fréquence.
Afin d’optimiser les haut-parleurs et le filtrage, le câblage interne fait appel à différentes sections de conducteurs Van Den Hul.
L’installation
Si notre première écoute des Stellar a eu lieu lors du dernier salon high-end de Munich en mai dernier, c’est dans l’auditorium de Davis Acoustics, à Troyes, que nous avons pu les déguster longuement et dans les meilleures conditions. Elles étaient alimentées par l’excellent amplificateur de puissance Gryphon Essence, sur lequel était connecté un DAC/lecteur réseau/préamplificateur Atoll ST300 Signature puis Meitner MA3. Le câblage était confié à la série Eurêka de chez Esprit. Chez Davis, la pièce d’écoute est vaste, confortable, neutre, et permet aux enceintes de s’exprimer à très fort volume sans que l’on note la moindre contrepartie acoustique. Nous avons donc pu profiter d’une très belle séance où les styles musicaux les plus divers se sont succédé avec délice.
Le son
Après plusieurs minutes d’écoute ininterrompue des Stellar, la première notion qui vient immédiatement à l’esprit, c’est « aisance ». Vous enchaînez les pistes, et tout passe avec une facilité déconcertante. Voilà : les Stellar sont des enceintes faciles, voire facilitantes. C’est un compliment peu commun, mais d’une très haute valeur à nos yeux. Rien n’est plus difficile que de reproduire la musique enregistrée pour qu’elle s’écoule avec naturel, de la façon la plus agréable possible. Car une multitude de critères entrent en ligne de compte. Il faut que toutes les composantes soient au top pour que la reproduction soit au top. Rien n’est plus compliqué ! Et pourtant, avec les Stellar, la notion de naturel prend ici tout son sens. Que vous écoutiez une œuvre complexe ou très simple, à un niveau sonore totalement débridé ou quasiment en sourdine, vous pourrez jouir d’un résultat aussi élégant que réaliste. À l’écoute du merveilleux disque d’Hadouk Trio enregistré en live à FIP, nous jouissons d’un spectacle sonore étonnamment liquide, léger et aérien. Le son remplit parfaitement la pièce d’écoute, qui est ici très grande, sans jamais forcer. « Effortless, easy, always easy », nous avait dit l’un de nos compagnons d’écoute à Munich… Comme nous le comprenons ! Les percussions, les cordes pincées, grattées, la perception du métal, l’impact sur les membranes, rien ne nous échappe. Sur notre Radiohead préféré, In Rainbows, la base est hyper détourée, la voix puissante, modulée et douce. C’est d’autant plus étonnant que nous écoutons à un niveau sonore particulièrement indécent. La batterie nous assène des coups au plexus, les sensations physiques sont dantesques.
Tout cela avec un très bel effet stéréophonique. Sur « Unfinished Sympathy » du premier album de Massive Attack, la différenciation des plans dans le sens de la profondeur est très précise. On pourrait presque compter les couches de son. Pourtant, on sent que les Stellar en demandent plus. L’organisateur de notre écoute décide donc de connecter un convertisseur encore plus performant, en l’occurrence un Meitner MA3. Du coup, l’ampli Gryphon Essence semble se lâcher et délivre dès lors une modulation musculeuse et contrôlée au millimètre. La leçon immédiate de cette anecdote est que les Stellar méritent le meilleur à tous les étages, que cela soit au niveau de la source comme de l’amplification. Dont acte. On sent une amélioration évidente en matière de tenue des notes, avec un legato considérablement amélioré, et un délicieux sens de la modulation. Sur le « Roxanne » de Police, le suivi rythmique est tout simplement extraordinaire, avec une frappe énergique et une mélodie scandée avec entrain. Sur l’inimitable
« Walking On The Moon », on se délecte d’une très belle profondeur avec un grave profond, nerveux, d’une voix claire totalement dépourvue de surépaisseur, et toujours d’une très belle spatialisation.
NOTRE CONCLUSION
« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément. » La maxime de Nicolas Boileau résume on ne peut mieux le comportement admirable des Stellar en toutes circonstances.
Comme nous l’avons dit, ces enceintes sont faciles. Et il est très difficile de réaliser des reproducteurs sonores qui rendent l’écoute de vos disques préférés aussi évidente. Il a fallu un énorme travail à Olivier Visan et à l’équipe de Davis Acoustics pour y parvenir. Une multitude d’essais de filtrage, de transducteurs, de charge acoustique ont été nécessaires pour parvenir à un équilibre aussi naturel. Car s’il est bien une qualité que ces enceintes incarnent plus que toute autre, c’est le naturel et l’on pourra dire tout ce que l’on veut, mais cela représente la vertu cardinale de toute bonne chaîne hi-fi. Si l’on ajoute à cela le fait que les Stellar procurent un spectre sonore hyper large sans aucune compression, et que nous avons affaire à un produit 100 % français, on n’est pas loin de l’équation parfaite. Nous avons adoré ces nouvelles enceintes Davis Acoustics. Elles incarnent une sorte de perfection sonore et prouvent que le constructeur de Troyes peut faire jeu égal avec les réalisations les plus ambitieuses. Très chaleureusement recommandées !
FICHE TECHNIQUE : DAVIS Stellar
- Origine : France
- Prix : 35 000 €
- Dimensions : 330 x 1350 x 600 mm
- Poids : 100 kg
- Puissance nominale : 20 W
- Puissance maximale : 300 W
- Rendement : 91 dB
- Bande passante (+/- 3 dB) : 30-30 000 Hz
- Impédance : 8 ohms (5 mini)
- Filtrage (coupure) : 300 Hz et 3 000 Hz
Paru dans VUMETRE n° 42
VUMETRE N°42
Juillet – Août 2022 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 €