Avec les dernières normes énergétiques, la légendaire marque nippone Luxman risquait de ne plus voir ses amplificateurs en classe A passer les bancs d’essai. Alors elle a pris les devants pour repenser l’architecture de ses produits en classe AB, afin de se rapprocher le plus possible d’une sonorité habituellement rendue par la classe A. Ainsi vient d’apparaître le circuit de rétroaction Lifes 1.0, inédit au nouvel amplificateur L-507Z, faux successeur du L-507MkII et vrai nouveau fleuron des intégrés de la marque, aux côtés du L-509X. À cette occasion, nous avons pu tester en exclusivité l’un des premiers appareils livrés en Europe.
Àl’aube de son 100e anniversaire attendu en 2025, Luxman revoit une fois de plus en profondeur ses technologies pour s’adapter au mieux aux problématiques du monde actuel. Et si la marque a su créer quelques-uns des plus beaux amplificateurs depuis près d’un siècle (des célèbres modèles à tubes à ceux sur transistors en classe AB), elle doit aujourd’hui encore repenser la conception de ses produits, afin d’ôter de son catalogue les amplis à transistors en classe A, trop gourmands en énergie et dont la consommation n’est plus acceptable pour de nombreuses normes (dont celles européennes), de plus en plus drastiques année après année, à mesure que la crise écologique se fait davantage ressentir.
On pourra donc regretter le somptueux L-590AXII, parmi les meilleurs amplificateurs en classe A actuels, d’une chaleur référente à cette technologie, pour une puissance de 2 x 30 W sous 8 ohms déjà très confortable avec de nombreuses enceintes. On regrettera également l’intégré L-507MkII, classe AB de 2 x 110 W au tarif de 6 590 €, dont le L-507Z reprend la base, mais pour presque tout améliorer, d’où un nouveau prix près de 3 000 € supérieur, à 9 490 €.
Plus proche du L-509X de 2 x 120 W en classe AB (lancé à 9 690 € et maintenant à 10 690 €), le L-507Z utilise comme tous les amplificateurs Luxman un circuit d’alimentation électrique à forte inertie, constitué d’un transformateur de puissance EI de grande capacité à haute régulation, combiné à des condensateurs de filtrage de huit fois 10 000μF, soit deux fois plus que pour le L-507MkII et autant que le L-509X. La forte alimentation en courant instantané fournie permet alors une grande stabilité, retrouvée dans la sonorité finale. La partie préamplificatrice, et notamment la gestion du volume, reprennent les derniers développements de la technologie brevetée LECUA1000 (Luxman Electronically Controlled Ultimate Attenuator), directement dérivée du préamplificateur autonome C-900u et déjà installée sur le L-509X. Cet atténuateur informatisé, dont la carte imprimée en 3D est intégrée au circuit d’amplification, permet un réglage du volume sur 88 pas, avec pour avantage non seulement d’améliorer la finesse du traitement du signal à mesure que l’on baisse le volume, mais aussi de mieux résister aux vibrations et donc de gagner en robustesse par rapport aux versions précédentes.
Nouveau circuit de rétroaction lifes 1.0
Outre cette nouvelle conception revue pour diriger toujours le signal par le chemin le plus court, avec un traçage non angulaire des circuits imprimés dans le but de fluidifier au mieux le courant et de limiter les boucles et les effets d’impédance de masse, la particularité du L-507Z se trouve avant tout dans son circuit de rétroaction amplifié. À nouveau totalement repensé, malgré la dernière génération ONDF 4.0 (Only Distortion Negative Feedback) encore retravaillée en 2018 pour le L-509X, ce circuit est à présent dénommé LIFES 1.0 (Luxman Integrated Feedback Engine System). Lancé récemment sur l’amplificateur de puissance M-10X, sa conception part de celle éprouvée depuis plus de vingt ans jusqu’à la dernière génération, basée sur trois niveaux, un étage parallèle et un étage équipé de Darlington (combinaison de deux transistors bipolaires qui permet d’en décupler le gain), puis un circuit Darlington à trois étages associés à une structure push-pull à quatre parallèles pour l’étage de sortie. Partant de ce principe, la structure a encore été revue pour réduire le nombre d’éléments mis en parallèle et diminuer de moitié la distorsion de l’étage d’amplification, tout en repensant l’étage de sortie sur une configuration push-pull Darlington à trois étages et à triple parallélisme, ce dernier niveau finalement plus proche de celui du L-590AXII en pure classe A que du plus récent L-509X en classe AB. Les relais de haut-parleurs ont également été retouchés, configurés en parallèle et à faible résistance. Ils améliorent un facteur d’amortissement également favorisé par le câblage OFC, raccourci et à présent encore plus direct vers les bornes haut-parleurs.
Changement dans la continuité
Par rapport aux châssis précédents, celui du L-507Z, encore plus robuste par son architecture interne, permet de jouer au jeu des sept erreurs quant à son design extérieur, avec toutefois une différence flagrante : il n’y a plus six petits sélecteurs en façade comme sur tous les autres modèles actuels, mais seulement quatre. La gestion des haut-parleurs, qui permet de choisir une paire A, B, aucune ou les deux en même temps, est maintenue, tout comme la gestion des basses, des aigus et de la balance. En revanche, le Rec Out disparaît, tandis que la validation d’une cellule MM ou MC se fait à présent seulement par un petit bouton, si tant est que l’on souhaite utiliser le préampli phono intégré de série à l’amplificateur.
En plus des deux gros sélecteurs gauche et droit, respectivement utilisés pour gérer comme toujours les entrées des sources et le volume, les vumètres retrouvent le rétroéclairage blanc du L-509X, là où auparavant, les modèles en classe A étaient de lumière jaune et les modèles en classe AB de lumière bleu. Au châssis aluminium gris clair, unique teinte disponible et référente à Luxman, vient se greffer le capot aux deux longues grilles plastiques connues sur le L-590AXII, plutôt que le nouveau modèle métallique découpé du L-509X, dont le L-507Z reprend cependant les quatre pieds de soutien en fonte.
La face avant reçoit également deux prises casque, une 6,3 mm standard et une inédite 4,4 mm avec un câblage indépendant gauche et droit pour améliorer la séparation des deux canaux.
La face arrière offre quant à elle des branchements toujours pléthoriques, par lesquels peuvent venir s’intégrer en plus de deux paires de haut-parleurs jusqu’à sept sources, dont quatre en RCA avec des borniers plus larges (20 mm) faits d’un alliage de cuivre et de laiton pour l’entrée 1, classiques (18 mm) et en cuivre pur pour les RCA Line-2, 3 & 4. À côté s’adjoint une paire de borniers RCA phono liée à une masse ainsi que deux entrées XLR symétriques. Une sortie Pre Out permet également de ne profiter que de la partie préampli, tandis qu’une entrée Main In offre à l’inverse de n’intégrer que la partie amplificatrice de l’appareil, tout cela complété par des entrées et sorties Trigger 12 V/0,1A, si l’on veut allumer plusieurs appareils en même temps.
De série, le modèle de télécommande RA-17A permet de sélectionner les entrées et de gérer le volume à distance, en plus de quelques paramètres sonores et dans le cas d’un branchement de l’amplificateur avec un lecteur CD ou SACD Luxman, des fonctions de base de ce dernier.
L’installation
Testé sur un système où se place habituellement un amplificateur intégré japonais en pure classe A d’une marque concurrente, le Luxman L-507Z a su immédiatement trouver sa place. Il a été relié à de nombreuses paires d’enceintes, comparé sur son préampli phono à un Vida Prima et un Gold Note PH-10, sur les entrées casque à un Sugden Masterclass HA-4 et bien entendu, nous a permis d’intégrer les sources tant par ses entrées symétriques qu’asymétriques, avec comme toujours pour ce type de produit un gain musical supérieur lors de branchements XLR. Les borniers de haut-parleurs privilégient d’utiliser les fourches, même si nous avons également relié à plusieurs reprises des fiches bananes. Enfin, le fait de jouer à déplacer l’amplificateur sur plusieurs étagères pour l’utiliser également lors de notre test du meuble Solidsteel nous a permis de vérifier la résistance de ses pieds aux divers supports.
Le son
Parmi les plus belles marques de la haute-fidélité, Luxman s’identifie par une signature sonore immédiate, encore mieux travaillée sur le L-507Z que sur les modèles en classe AB précédents. Grâce à sa nouvelle conception du circuit de rétroaction, ainsi qu’à celle éprouvée des circuits d’amplification et de gestion du volume LECUA, ce nouvel amplificateur intégré présente une pureté sonore et une finesse rarement atteintes. Plus ductile qu’un intégré Accuphase, même en classe A, le L-507Z parvient à retrouver le soyeux du L-590AXII, tout en bénéficiant d’une franchise d’attaque plus proche des classes AB de la marque. La chaleur de la classe A n’est peut-être pas retrouvée à 100 %, mais elle apparaît bien plus que sur les modèles précités, pour une rondeur toujours présente, à même de procurer une écoute très agréable, libre de transporter l’auditeur pendant plusieurs heures sans aucune sensation de fatigue.
Sur des pistes de rock, le L-507Z développe autant la puissance que la dynamique, tout en gardant une véritable souplesse, encore plus audible à l’écoute de musiques naturelles comme la musique classique, le jazz ou le blues. Pour ces dernières, on profite alors autant de la qualité de la scène sonore, toujours ample, que de la beauté des timbres, dont bénéficient non seulement les instruments, mais encore plus les voix, avec ce grain particulier, d’une sensation très analogique, même lorsque l’on utilise un streamer pour source. Les vumètres particulièrement classieux par leur rétroéclairage blanc, entre lesquels le niveau du volume est maintenant inscrit en rouge, peuvent alors évoluer à loisir pour le plaisir des yeux et surtout des oreilles, de -80 dB à une zone rouge de 0 à 3 dB et plus, vers laquelle nous ne nous sommes pas aventurés, par respect pour nos voisins comme pour nos enceintes.
Vérifié avec une cellule MC de moyenne gamme, le préampli phono intégré surpasse de nombreux préamplis autonomes d’entrée et de milieu de gamme, sans atteindre le niveau d’ouverture de nos deux modèles à plus de mille euros, tandis que les sorties casque sont surprenantes, tant elles ne sont pas secondaires et peuvent concurrencer des amplis casque autonomes haut de gamme, par le fait que leurs circuits d’amplification sont directement dérivés de ceux pour les haut-parleurs.
Conclusion
Légendaire depuis bientôt cent ans, Luxman montre avec le nouveau L-507Z que ses ingénieurs n’ont rien perdu de leur capacité à toujours remettre en cause les technologies les plus éprouvées, pour encore et toujours mieux améliorer leurs modèles. Avec son nouveau circuit de rétroaction Life 1.0, le nouvel amplificateur intégré en classe AB réussit l’exploit de se rapprocher au plus près des sonorités habituelles de la classe A. Aux sensations de rondeur du son s’ajoutent une précision des détails et une absence des bruits aptes à emporter l’audition sur des sphères d’une rare splendeur, avec en plus l’avantage d’une consommation énergique relativement faible et d’un appareil qui chauffe peu. Tout cela a évidemment un prix, mais si les 9 490 € à débourser pour entrer dans ce monde représentent une somme conséquente, ils s’accordent toutefois à l’expérience musicale vécue ensuite !
FICHE TECHNIQUE : LUXMAN L-507Z
- Origine : Japon
- Prix : 9 490 €
- Dimensions : 440 x 178 x 454 mm
- Poids : 25,4 kg
- Type d’amplification : Classe A/B
- Puissance nominale :
- 2 x 110 W sous 8 Ω
- 2 x 220 W sous 4 Ω
- Impédance d’entrée : 180 mV/79 kΩ (XLR) ; 180 mV/47 kΩ ; 2,5 mV/47 kΩ (Phono MM) ; 0,3 mV/100 Ω (Phono MC)
- Distorsion harmonique (THD+N) : 0,007 % (8 Ω, 1 kHz)
- Ratio signal/bruit (S/N) : >105 dB (XLR, RCA) ; >91 dB (Phono MM) ; >75 dB (Phono MC)
- Réponse en fréquence : 20 Hz – 100 kHz ; +-3 dB
- Entrées analogiques : 4 x RCA ; 2 x XLR ; 1 x RCA Phono
Paru dans VUMETRE n° 43
VUMETRE N°43
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