Présenté un an après l’amplificateur E-5000, l’Accuphase E-4000 remplace le E-480 en prenant ce qui semble être le nouveau code numérique des intégrés en classe A/B de la marque. Modifié à partir des dernières technologies, dont celles du récent bloc stéréo P-7500, l’E-4000 voit son bruit encore diminuer et son facteur d’amortissement considérablement augmenter, pour un silence de fonctionnement à toute épreuve, porté par une puissance toujours très confortable de 2 x 180 W sous 8 ohms, disponible pour combler presque toutes les enceintes du marché.
Depuis son premier produit lancé il y a plus de cinquante ans, Accuphase ne déroge jamais à son identité de marque : un châssis inéluctablement couleur champagne, et depuis son premier amplificateur à transistors (P 300), de massifs vumètres en façade. Pour le nouveau E-4000, rien ne vient remettre en cause ces principes et tandis que le E-480 avait sorti les LEDs rouges et marqueurs pour les déplacer sur la partie aluminium, cette nouvelle version revient au design précédent, avec une réintégration des informations à l’intérieur de la grande vitre, surtout présente pour afficher deux superbes vumètres. Plus larges et encore plus visibles, ces indicateurs reprennent la plage de la version précédente en descendant jusqu’à -50 dB (avant d’indiquer -∞) pour aller de l’autre bord jusqu’à une ligne rouge après 0 dB, la seule différence notable étant l’ajout d’un 5 entre le 20 et le 10 sur la partie négative.
Au-dessous, les LEDs rouges s’allument toujours pour donner les mêmes informations que les générations précédentes, à savoir par exemple si l’on est connecté au DAC (à condition d’avoir pris la carte optionnelle DAC-60 à 1 240 €) ou si l’on sort sur la paire d’enceintes A ou B, cette gestion toujours très ergonomique grâce aux petits sélecteurs sous la trappe. Apparus dans cette présentation sur le E-480 et le E-650, les sélecteurs restent au nombre de trois par côté avec au milieu six boutons, à présent rectangulaires et non plus ronds, pour un effet encore plus classieux, bien relancé par l’apparition comme sur le E-5000 de deux fins contours plaqués or autour des grosses molettes de sélection des entrées et du niveau de volume.
À l’arrière, on pourrait citer le poème de Verlaine, « j’ai tout revu », tant rien n’a changé dans l’organisation des entrées et sorties, ni au niveau des deux slots pour cartes optionnelles. Ces derniers permettent d’éviter partiellement l’obsolescence sur le DAC en l’améliorant à chaque nouvelle mise à jour, ou d’intégrer une carte phono AD-50 (MM/MC ; 990 €). Elle aussi est modifiée au fil des ans si l’on ne souhaite pas tout simplement ajouter une entrée ligne Line-10 (190 €), au cas où les cinq déjà présentes ne suffiraient pas. Une entrée et sortie ligne REC complètent l’appareil, également en possession d’une sortie RCA Pre Out pour utiliser indépendamment la partie pré-amplificatrice, notamment dans le cas d’une bi-amplification, juste à côté d’une entrée RCA Main In, pour n’utiliser au contraire que l’amplificateur de puissance. Ces deux entrées et sorties indépendantes sont également disponibles en XLR afin de maximiser l’architecture entièrement symétrique de l’appareil, à son gros et unique transformateur torique près.
E-4000, POUR E-480 EN MIEUX
Vous l’aurez compris, les différences extérieures ne servent qu’à donner un petit lifting à un produit déjà référent dans sa gamme, le E-480 ayant largement gagné en dynamique par rapport au E-470, tandis que le E-4000 se développe encore dans ce qu’Accuphase cherche le plus à éliminer : tous les bruits parasites qui rappellent que l’on écoute une boîte et un enregistrement, tandis que la marque recherche au maximum à recréer un effet de réalisme sonore de plus en plus juste génération après génération. Alors, c’est à l’intérieur que les changements se montrent le plus importants, et si la structure reste exactement la même, le transformateur est placé en plein centre derrière deux gros condensateurs de filtrage – toujours de 40 000μF pour 80 V – entre deux amples dissipateurs thermiques. Dessus sont installées les sections d’amplification, maintenant constituées de transistors push-pull quadruples parallèles et de composants discrets, pour développer la puissance maximale de 2 x 180 W sous 8 ohms et 2 x 260 W sous 4 ohms. Référence de la marque, la partie de gestion du volume est toujours dévolue à une section AAVA (Accuphase Analog Vari-gain Amplifier) pour tenter d’éliminer toutes les résistances variables dans le chemin du signal. Cependant, cette génération parvient à abaisser encore de 20 % son niveau de bruit, grâce à l’apport en entrée de six amplificateurs tampons en parallèle et surtout d’un circuit ANCC (Accuphase Noise and Distortion Cancelling Circuit), placé entre la gestion de volume et le convertisseur courant-tension (I-V) dans le bloc AAVA. Totalement parallèle pour gérer indépendamment les canaux gauche et droit de l’intégration des sources à la sortie vers les enceintes, l’E-4000 gagne 33 % sur le facteur d’amortissement, qui passe de 600 à 800 pour équivaloir à celui du E-650 (amplificateur en pure classe A, 10 990 €) et se rapprocher du facteur de 1000 des E-5000 (classe A/B, 13 490 €) et E-800 (classe A, 14 990 €). Pour cela, le nouvel amplificateur intégré passe sur des commutateurs MOS-FET à très faible résistance de 1,6 mega-ohm (contre 2,0 mega-ohms sur le E-480) placés juste derrière les borniers d’enceintes, avec pour résultat de limiter encore mieux les distorsions, celles d’intermodulations et harmoniques ayant déjà été largement prises en charge en amont dans l’appareil.
L’INSTALLATION
Tout juste arrivé en France, l’E-4000 n’était d’abord disponible qu’en un seul exemplaire, reçu par le distributeur Hamy Sound pour être installé chez CTA à Paris, où nous sommes donc allés avec l’avantage de pouvoir comparer l’Accuphase à des produits McIntosh, mais surtout à ses confrères E-380, E-650 et E-800. Le test a été effectué sur des sources idéalement combinées, puisqu’il s’agissait du lecteur CD-SACD Accuphase DP570 (10 090 €) – dont nous avons également utilisé le DAC pour lui adjoindre le transport réseau 3D-Lab Nano Signature –, ainsi que du lecteur réseau-CD-SACD Mark Levinson 5101. Le câblage du plus haut niveau de Wireworld, dont CTA est point-pilote, nous a permis de relier non seulement les appareils précités entre eux, mais aussi les enceintes ProAc K6 (17 250 €), Sonus Faber Maxima Amator (15 000 €), JMR Orfeo Grande (14 800 €) et parce qu’elles étaient prêtes pour une écoute dans la journée, les plus raisonnables Everest Ubik 215C V3 (7 990 € tout de même). Connaissant les cartes phono et DAC, nous n’avons pas jugé utile de les retester ici, pas plus que la prise casque (Accuphase n’évoque aucune retouche et nous connaissons bien celles du E-600 et du E-380). À partir de là, nous avons été libres pendant quelques heures pour tous les tests disponibles, sur tous les fichiers de qualités diverses lancés tant en streaming qu’avec quelques SACD, remarquables à la lecture grâce au DP570.
LE SON
Alors que le E-480 était véritablement supérieur au E-470, le E-4000 se veut surtout une amélioration en douceur du précédent, dont il garde toutes les qualités, en développant encore certaines d’entre elles, pour un rendu encore plus musical. Alors, et sans retrouver la ductilité du E-5000, le E-4000 développe la justesse des timbres, à notre goût plus équilibrés que sur un McIntosh, surtout sur la partie grave. Mais surtout, il se démarque par son niveau de bruit extrêmement faible, qui peut sembler un détail pour le néophyte, mais parvient à créer une scène parfaitement noire, d’une pureté rare, supérieure à celle du E-650 pour lequel nous pouvons en revanche préférer le charme et la rondeur de la classe A.
Plus net, l’E-4000 se montre également extrêmement précis, sans perdre pour autant sa souplesse par la profusion de détails, des cordes grattées sur les albums du regretté Jeff Beck au toucher fin du pianiste Gabriel Tacchino, lui aussi mort en ce début d’année.
Avec l’Alpensinfonie de Richard Strauss par Karajan, l’éclat de la scène comme la puissance des attaques créent un effet d’une rare ampleur dans les climax, en plus de toujours parfaitement placer les instruments et de laisser légèrement à l’arrière-scène le grondement des contrebasses, tout aussi fluides et sublimes dans leurs glissandi. Comparé au E-380, le nouvel Accuphase améliore la scène sonore et le réalisme en effaçant particulièrement les distorsions. Il profite à loisir des fichiers les mieux encodés, particulièrement ample dans la largeur comme dans la profondeur de scène à l’écoute d’un SACD, sans non plus se sentir en retrait dans les gravures plus compliquées, que l’on aime écouter pour leurs qualités musicales même si l’enregistrement est moins flatteur. Et surtout, cet amplificateur intégré sait rapidement se faire oublier, si tant est qu’on ait envie de l’oublier, par sa capacité toute naturelle à dynamiser avec la même facilité toutes les enceintes testées. Relié aux Maxima Amator, il parvient immédiatement à en déployer un grave profond en même temps qu’il sépare tous les éléments du spectre, encore plus évidents avec les ProAc, tandis que l’écoute sur JMR permet de vérifier qu’il sait aussi s’adoucir, sans chercher à démontrer sa puissance, pour au contraire toujours la contenir en même temps qu’il la délivre de la plus pure simplicité.
NOTRE CONCLUSION
Lancé seulement quatre ans après l’E-480, l’Accuphase E-4000 ne cherche en rien à révolutionner l’une des marques les plus prestigieuses du monde, pour à l’inverse évoluer par l’amélioration continue des déjà très grandes qualités des précédentes versions. Légèrement moins chaleureux qu’un E-650 en pure classe A (10 990 €) et moins souple que le E-5000, dont la surpuissance crée encore mieux l’effet de force contenue, l’E-4000 se place parfaitement dans sa gamme, juste au-dessous de la barre des 10 000 €, pour ravir les possesseurs d’enceintes énergivores ou au fonctionnement très supérieur lorsque l’on n’hésite pas à leur mettre des amplifications vigoureuses. Parfaitement intégré au sein du catalogue, il améliore considérablement la scène sonore par rapport à la précédente génération, en même temps qu’il garde le charme des vumètres à aiguilles (contre des vumètres numériques sur les produits en classe A) et la praticité d’un Accuphase, tant par le nombre d’entrées symétriques qu’asymétriques, que par la possibilité d’y relier deux paires d’enceintes ou de l’intégrer en RCA ou en XLR pour bi-amplifier l’une d’entre elles avec un autre amplificateur de la marque. À écouter impérativement si l’on souhaite acquérir un appareil dans ce budget.
Fiche technique
- Origine : Japon
- Prix : 9 290 €
- Dimensions : 465 x 181 x 428 mm
- Poids : 24,4 kg
- Type d’amplification : Classe A/B
- Puissance nominale :
- 2 x 180 W sous 8 ohms
- 2 x 260 W sous 4 ohms
- Distorsion harmonique (THD+N) : 0,05 %
- Réponse en fréquence : 20 Hz à 20 kHz (+-0,5 dB)
- Rapport signal/bruit (S/N) : 102 dB (symétrique) ; 109 dB (asymétrique)
- Connexions analogiques :
- Entrées : 5 x RCA ; 2 x XLR ; 1 x RCA Main In ; 1 x XLR Main In ; 2 x slots (option)
- Sorties : 1 x RCA Pre Out ; 1 XLR Pre Out
VUMETRE N°46
Mars – avril 2023 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 € Outre le plaisir de découvrir les nouveautés liées à votre passion et l’activité de l’industrie audio, nous vous proposons deux formats :
VUMETRE N°46
Mars – avril 2023 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 € Outre le plaisir de découvrir les nouveautés liées à votre passion et l’activité de l’industrie audio, nous vous proposons deux formats :
Paru dans VUMETRE n° 46
VUMETRE N°46
Mars – avril 2023 Version papier : 10 € (frais de port inclus) / Version digitale : 7 € Outre le plaisir de découvrir les nouveautés liées à votre passion et l’activité de l’industrie audio, nous vous proposons deux formats :